vendredi 31 décembre 2010

"Adieu ma concubine" - Chen Kaige

   
Plongée dans le monde de l'opéra pékinois

"Adieu ma concubine" est tout d'abord le titre d'une pièce d'opéra très célèbre narrant le suicide de Yu Ji, la favorite du roi Chu Xiang Yu, après que les armées de celui-ci furent défaites. La scène du suicide, avec le chant de Yu Ji et sa danse aux épées est certainement la scène d'opéra chinois la plus célèbre, étant celle qui est généralement présentée lors de petits spectacles où l'on peut goûter à des extraits d'opéra chinois sans avoir à "subir" toute la pièce. C'est ainsi que me l'on présenté mes collègues chinois qui ont ajouté : "l'opéra peut être un peu ennuyeux..." Du coup,  trois fois déjà que j'ai l'occasion de voir de l'opéra, et trois fois que je vois cette même scène :-) J'ai pu ainsi constaté qu'à chaque fois, ce sont les mêmes gestes, les mêmes inclinaisons de la voix, les mêmes pas, le même costume: une technique vocale et gestuelle extrêmement précise. Que le film reproduit fidèlement.

"Adieu ma concubine", le film, nous plonge donc dans le monde de l'opéra en suivant les deux acteurs principaux de la pièce, le roi et sa concubine, des années 1920 aux années 1970. L'histoire vue par l'opéra. De leur rude enfance à l'école de l'opéra, à la fin de la Révolution culturelle, l'art traditionnel, la beauté et l'amitié sont confrontés à la période historique la plus troublée de Chine. Un très beau film, avec une photographie parfaite.

District 798

   
Décevant

La scène artistique contemporaine pékinoise, passage obligé pour les amoureux de l'art, s'appelle 798 District. Au nord-est de Sanlitun, elle occupe une zone industrielle transformée en parc touristique de l'art contemporain. De fait, on y trouve "presque" plus de boutiques souvenirs et de restos et bars "occidentaux" que de galeries d'artistes. Un peu décevant, tout de même. Quelques oeuvres valaient cependant le détour, mais il faut se renseigner pour vraiment cibler les expositions, s'y promener sans rien en tête est possible, bien sûr, mais ne mène pas à d'étonnantes découvertes. Période creuse en hiver?

Ma préférence est allée aux oeuvres alliant l'art contemporain à la peinture chinoise et aux céramiques. Dommage que les trois rues des céramiques n'aient pas de céramiques! Photos... 

mercredi 29 décembre 2010

Et si on chantait un peu en chinois?

   

"Ne jamais dire jamais!" m'a-t-on appris quand j'étais pas plus haute que trois pommes et que je découvrais avec délice le côté révolté de l'expression. Et pourtant, il est des choses auxquelles l'on pense vraiment définitivement et incontestablement opposé un refus ferme et inébranlable. Chanter au karaoké faisait partie de ces choses en ce qui me concerne. Et pourtant...

Difficile d'y échapper en Chine, cela fait un peu partie de l'obligation sociale si l'on ne veut pas passer pour un parfait éteignoir! Et se montrer bon "panyou". Les chinois adorent KTV au point que ceux-ci pullulent, de l'homme ambulant avec tout le matériel disponible pour pousser la chansonnette dans la rue ou sur la terrasse d'une maison de thé, entre deux pipas et une tasse de thé, au super KTV de luxe rutilant de lustres, de tapis et de néons, en passant par la cellule pourrie dans  une bâtisse croulante et le KTV flottant sur les rives du Yangtse. Une soirée KTV fait en revanche rarement partie du programme d'une bonne sortie entre amis en Europe. Parce que chanter devant ses potes avec un taux peu élevé d'alcool dans les veines, ça ne se fait pas. C'est, comme qui dirait, la honte. Une honte que les chinois ne comprennent pas, eux qui dansent dans les rues et chantent à plein poumons sans aucune inhibition. Du coup, les premières fois, afin de bien faire comprendre ce que l'on ressentait à nos élèves fous de chansonnette, il a fallut que mes collègues profs et moi utilisions le vocable le plus explicite: "on aime pas chanter parce que ça nous fait perdre la face!"
"Ben pourquoi?" fut la seule réponse étonnée et on s'est retrouvé sur les planches, à chanter devant les foules enthousiastes. C'est connu, si on veut un bon fan club, il faut venir en Asie!

Une fois l'épreuve passée, hop, sortie au KTV avec des amis. C'est ce qu'il y a de plus banal comme sortie ici. En une année, on se retrouve finalement à jouer souvent des cordes vocales et il faut finalement se faire une raison: si on veut vivre en Chine, on doit chanter. Bon. Une fois la chose acceptée, autant en titrer le maximum de plaisir, car c'est finalement très amusant. Même délirant. Les KTV proposent un grand choix de chansons chinoises, bien sûr, mais il faut lire le chinois. Ils proposent aussi des chansons en anglais, pas des plus récentes, dans lesquelles figurent bien sûr immanquablement les Beatles (pas une soirée KTV n'a passé sans que l'on aie chanté au moins une fois Hey Jude) et, au miracle, quelques chansons françaises! Et là, catastrophe! On se retrouve à chanter pendant de très très longues minutes: alouette! Oh humiliation! Le plus drôle, c'est que la télévision propose, pour illustrer les chansons, des diaporamas fort incongrus. Ainsi, nous nous sommes retrouvés à chanter "this is my way" sur des photos de matériel militaire lourd! Et "Let it be" sur des paysages très british, églises, prairies avec haies, Londres...

Mais bon. Ça, c'est pour les débuts. Sachant que les chinois adorent quand les étrangers chantent en chinois, et que c'est agréable d'avoir un public enthousiaste, autant faire un petit effort et se mettre à la chanson chinoise. Pour cela, il y a ce splendide site malheureusement lisible seulement avec un proxy depuis la Chine, mais qui aidera ceux qui veulent se préparer, avant de venir affronter l'enthousiasme des chinois en les épatant avec le tube du moment! En attendant, je m'exerce de mon côté sur you are a song in my heart de Wang Lee Hom qui est ce que j'ai trouvé de plus facile à chanter avec un élève, pour la fête de noël. Et oui, chaque année qui passe, est marquée de ce petit rituel fort apprécié des étudiants: le prof sort de sa peau de prof, l'étudiant s'éclate et déploie ses talents, on se voit sous un autre jour avant de reprendre, l'air de rien, le cour normal des classes avec toutefois cette sensation de se connaître un petit peu mieux. J'ai arrêter de dire "non, non, non". Après tout... c'est tellement plus sympa! Bon, je retourne m'entraîner...


Filmé brièvement par un collègue. Le son est mauvais
et je suis paralysée par le trac, je me plante aussi
mais... c'est en CHINOIS!!! 

dimanche 12 décembre 2010

Histoires de nu

  
De l'idéogramme de la femme dans la langue écrite chinoise

En Chine, les femmes sont nǚ Ça aide à s'en souvenir. Cet idéogramme fait  bien sûr partie des idéogrammes de base, que l'on retrouve partout, associé à d'autres éléments pour construire le sens. Ces associations nous donne l'occasion de plonger dans la perception du monde qu'avaient les chinois lors des premières formations de ces signes qui bien sûr se sont peu à peu modifiés au cours des siècles, et qui est transmise encore aujourd'hui à travers ces mêmes caractères. Par exemple, ici, la perception de la femme.

Premièrement, on la trouve associée au foyer. La bâtisse, en effet, se construit avec du bois, et contient une femme et du riz. On a lóu , le bâtiment (le bois en premier, le riz au-dessus de la femme, dans son grenier). Ensuite, une femme au foyer, cela veut dire que tout va bien, c'est un signe de paix. Quant au foyer, il est symbole de sécurité. C'est donc tout naturellement que l'idéogramme pour la paix et la sécurité, ān , se construit avec une femme sous un toit.Et quand une femme a un enfant, c'est une bonne chose. On a hǎo  qui veut dire bien. Bien sûr, tout ce qui a un rapport avec le lait se construit avec l'idéogramme de la femme, et surtout, la grand-mère apparaît comme celle qui a le lait. Se marier avec une femme, c'est "trop"! Ainsi la femme mariée, "Madame", se dit tàitài 太太 ce qui veut dire "trop trop".Deux fois trop? Restons positif et ne nous vexons pas. Il est en revanche difficile de garder un sens positif à ce qui va suivre.

Deux femmes? C'est nuán , qui veut dire: se disputer, tromper, idiot. Hmmm. Le monde ne change pas et quand mes élèves chinoises disent du français que c'est une langue sexiste, j'ai quelques arguments pour renvoyer la balle. Si deux femmes c'est aussi mauvais, qu'est-ce que ça donne avec trois? Ça donne jiān, ce caractère composé de trois femmes  qui a été simplifié en  (femme et sécher/épuiser) et qui veut dire perfide, méchant, traître mais fait aussi allusion à la sexualité "sale" et au viol. Charmant!

Attention de ne pas mettre une femme en colère . Son coeur s'enflamme 怒火 ou un souffle de colère vient l'ébranler 怒气. Comme quoi les colères des femmes n'ont pas fini de marquer les esprits!


Pour les mots se construisant avec la femme en radical, c'est ici.
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